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Un territoire à défendre

Par francois 91410 - 04-12-2012 09:40:36 - 10 commentaires

 

Un territoire à défendre

03 décembre 2012

 

 

 

 

Chaque matin, dès potron minet, fuyant à tout prix les embouteillages franciliens, je prends le train pour rallier Rambouillet à Montparnasse. 34 minutes de pur bonheur en heure de pointe, avec une grande probabilité de ne pas avoir de place assise. Banalité.

Pourtant aujourd’hui, exceptionnellement, je ne suis parti que vers 11 heures. Pour une fois je vais pouvoir être assis… Erreur, il y a autant de monde sur le quai qu’à 7 heures … Le TER Centre s’immobilise, et je pénètre dans la voiture destinée à accueillir des vélos : des crochets permettent de suspendre les vélos (il y en a souvent, même en heure de pointe !), dont les propriétaires dans ce cas essuient souvent un succès d’estime palpable ; s’il n’y en a pas des strapontins permettent à une dizaine de voyageurs de prendre place.

Manque de chance ce matin, un vélo position couchée accompagné de sa remorque et de plusieurs sacs de voyage prend la quasi-totalité de l’espace ; un globe-trotter certainement … J’arrive toutefois à me faufiler sous le pédalier et m’assied. Une odeur inhabituelle flatte mes narines : le propriétaire supposé du vélo a réchauffé sa gamelle et déguste un plat chaud à base de haricots… pourquoi pas ?! Le gars est jeune, une trentaine d’années ; il a l’air cool, propre sur lui.

Arrive en face de moi une dame d’une bonne cinquantaine d’années, genre disons BCBG voire bourgeoise eurélienne. Sans mot dire elle empoigne le vélo, tente de le pousser violemment pour libérer l’accès à un strapontin ; dans le mouvement, accessoirement, une pédale me frôle littéralement. Le jeune, apparemment stoïque, interpelle la malotrue :

- Attention madame, s’il vous plaît

J’ai acheté un billet, j’ai droit à une place assise

Puis elle réussit à poser son exigeant derrière sur le strapontin.

- (Silence) Madame, j’aurais préféré que vous me demandiez de déplacer le vélo plutôt que de le faire vous-même sans en demander la permission et sans effort de politesse

- Mais je ne vais pas faire une annonce au micro et aller à l’étage du train pour savoir à qui est ce vélo !

- Je pense que si vous aviez regardé autour de vous dans cette voiture, vous auriez facilement deviné que c’était moi ! et j’aurais avec plaisir déplacé le vélo, ce qui nous aurait évité cette discussion inutile…

- Mais jeune homme, je prends le train tous les jours, avec le boulot, je n’ai pas le temps de m’attacher à des détails

Justement, c’est ça que je déplore : le système oblige les gens à s’enfermer dans des règles qu’ils n’ont pas choisies. Personnellement, je suis sorti de ce système. Vous voyez, je reviens de Nantes, on nous avons défendu la ZAD (zone à défendre) ; vous avez entendu parler de l’aéroport de Nantes ? Un scandale, on exproprie des agriculteurs qui n’ont rien demandé et à qui on n’a rien demandé !

C’est bien (?!) (Silence)

Partout où je me rends, je fais toujours l’effort de prendre le moins de place possible, de faire le moins de bruit possible. Je n’exige rien de personne. Je ne touche même pas le RSA. Je ne vole rien à personne. Pour manger, je frappe à la porte des maisons. Si les gens me donnent quelque chose, c’est un grand plaisir, sinon, je n’insiste pas car je comprends bien, et je vais à la maison suivante !

Mais je ne vous reproche rien !

- C’est moi qui vous reproche la façon dont vous avez agi tout à l’heure en touchant à quelque chose qui ne vous appartient pas sans le demander. Je vous invite à venir à Nantes, vous verrez, vous y serez très bien accueillie, on vous donnera à manger et un hébergement. Tout le monde y est le bienvenu et se respecte ! Et je vous invite à aller voir le site internet zad.nadir.org !

Non rassurez-vous je ne pourrais pas vous rejoindre…

Mais pourquoi ça ? qu’est-ce qui vous en empêche ?

Je suis entré dans une autre vie, j’ai un travail, une maison, une famille…

On a toujours le choix, regardez celui que j’ai fait. Pensez-vous que je sois plus malheureux que vous ? j’ai choisi la liberté. Je suis bien plus heureux quand je mange quelque chose que l’on m’a offert que lorsque je l’ai acheté !

Je suis contente pour vous…

Jusque-là très poli et courtois le gars lâcha, un poil agacé :

Bien, je vois que vous êtes complètement abrutie, ça ne sert à rien d’insister…

- (Vexée) Bon, je crois que l’on va arrêter cette discussion.

 

Tout d’un coup, le silence enveloppa la voiture.

De toute évidence, tous les voyageurs méditaient et se délectaient de cet échange au-delà du réel.

Chacun je crois avait des convictions et un territoire à défendre…

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